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Loir-et-Cher : des victimes de fraudes bancaires peinent à se faire rembourser

L’association UFC-Que choisir accuse des banques de ne pas rembourser leurs clients victimes de fraudes. Des Loir-et-Chériens témoignent de leurs déboires.

 

Face à des litiges pour refus de remboursement de fraudes bancaires, la fédération UFC-Que choisir a déposé plainte, fin juin 2022, contre douze établissements pour pratiques commerciales trompeuses. Localement, l’association est régulièrement sollicitée pour ce type de problème. En voici deux exemples.

Marie-Thérèse, habitant dans le Blaisois, a été victime d’une arnaque qui lui coûte encore cher aujourd’hui. « Fin février, j’ai reçu un appel d’un conseiller sécurité de ma banque me disant qu’il avait vu une alerte sur mon compte et qu’il se chargeait de stopper la fraude. Ce Monsieur, je l’ai cru naïvement, bêtement, en convient Marie-Thérèse, bientôt 80 ans, préoccupée à l’époque par des problèmes familiaux. Il m’a assuré qu’il avait besoin de mes coordonnées bancaires. Je les lui ai donc données. Un code est apparu sur mon téléphone que je lui ai communiqué en pensant qu’il allait pouvoir arrêter cette fraude. »

« Je me trouve très stupide et coupable »

Sauf, qu’intriguée, elle regarde quand même l’état de ses finances et là, elle voit que l’intégralité de son compte d’épargne a été virée sur son compte courant, soit près de 18.000 €. « Le lendemain, lorsque j’ai appelé la banque pour faire opposition, j’ai appris que des virements en rafale avaient été effectués à l’étranger. »

Si elle est parvenue à récupérer 5.000 € qui avaient transité par l’Espagne et l’Allemagne, elle attend qu’on lui rembourse les 12.000 € partis en Lituanie. Après avoir décrit son cas à la médiatrice de la banque, celle-ci propose que la banque lui rembourse les deux tiers des 12.000 €.

« Elle me reproche d’avoir répondu à ce Monsieur et de lui avoir donné des codes par téléphone mais reconnaît que la banque aurait dû me prévenir suffisamment sur ces arnaques. Je trouve l’analyse correcte. J’ai un mois pour répondre à la médiatrice et lui dire si j’accepte la proposition. J’ai besoin de cet argent pour m’occuper de mes deux petits-enfants pour lesquels je suis tutrice, confie-t-elle. Je me trouve très stupide et coupable. »

J’ai peur de ne pas revoir la couleur de mes 1.990 €

Corinne Chaillou de Molineuf

La même mésaventure est arrivée à Corinne Chaillou, de Molineuf. En septembre dernier, un soi-disant conseiller de sa banque en ligne l’appelle pour lui parler d’un débit douteux. « Je ne me suis pas méfiée, j’étais débordée par mon travail. Sauf qu’en me contactant, il était sur mes comptes et voyait toutes mes opérations. Il a réussi à faire un virement vers une autre banque de 1.990 €. Je m’en suis aperçue quelques jours plus tard quand j’ai appelé ma banque pour lui signaler que je ne pouvais plus accéder à mes comptes en ligne. »

L’imposteur avait modifié ses identifiants. « J’ai fait opposition. Je pensais récupérer la somme qu’on m’avait volée, mais il en est hors de question pour la banque qui me dit que c’est de ma faute. J’aimerais avoir le temps d’entamer une procédure. J’ai peur de ne pas revoir la couleur de mes 1.990 €. L’UFC-Que choisir m’a conseillé de saisir la médiatrice de la banque. »

Depuis cette déconvenue, Corinne a changé de banque et est devenue excessivement méfiante. « Ça fiche un coup de se faire avoir comme ça. On tombe facilement dans le panneau. »

De son côté, l’antenne loir-et-chérienne de l’UFC-Que choisir a interpellé les parlementaires sur l’urgence d’instaurer un cadre garantissant l’effectivité du droit au remboursement des victimes de fraudes.

« Nous pouvons tous nous faire hameçonner »

L’association UFC Que choisir de Loir-et-Cher a recensé, depuis le début de l’année 2022, vingt cas de fraudes bancaires pour lesquels les banques n’ont pas remboursé leurs clients. « Aujourd’hui, nous sommes face à des fraudeurs très renseignés, qui se font passer pour des conseillers bancaires ou des opérateurs téléphoniques demandant les identifiants bancaires des usagers, explique Thierry Pineau, président de l’UFC Que choisir 41 et un des conseillers litiges. Les consommateurs qui s’adressent à nous sont des victimes, mais les banques partent du postulat qu’elles ne remboursent rien car ces usagers sont responsables de négligence. Or, la loi dit que la banque doit prouver que la personne a été négligente. Nous pouvons tous nous faire hameçonner. Parfois, on perd la notion du raisonnable. » Dans certains cas, les sommes perdues sont colossales, avec parfois une double peine quand les Agios tombent.

« Quand un consommateur est victime de fraude, nous lui conseillons de se manifester auprès de son agence bancaire. S’il n’y a pas de résultat à l’issue de ce rendez-vous, il faut envoyer un courrier en recommandé pour expliquer la situation. L’usager peut aussi ensuite saisir le médiateur des banques : dans ce cas, nous pouvons aider à constituer le dossier. »

Thierry Pineau ajoute que le dépôt de plainte de l’association au niveau national à l’encontre de douze banques va se jouer au pénal. La procédure judiciaire pourrait prendre des mois, voire des années avant d’aboutir. « Les banques vont lancer leurs avocats sur cette affaire. Sauf que pendant ce temps, on ne règle pas le problème des consommateurs qui attendent d’être remboursés. Un résultat favorable au pénal nous permettrait d’obtenir satisfaction au civil. »

>> Contact : UFC Que choisir 41, 17, rue Roland-Garros, à Blois, tél. 02.54.42.35.66. Courriel : president loiretcher.ufcquechoisir.fr
Pour étoffer son équipe, l’association recherche des bénévoles.

 

Pour les banques, « chaque situation est examinée »

Comment réagissent les banques face à l’accusation de l’UFC Que choisir ? Quelles sont leurs pratiques quand leurs clients sont victimes de fraudes ? Nous avons posé la question à quelques-unes d’entre elles.

« La protection des fonds et des données de nos clients est une priorité et nous déployons d’importants moyens pour y faire face, au même titre que toutes les banques françaises, indique La Banque postale. Nous menons une politique de prévention et de détection des risques, et mettons tout en œuvre pour assurer la sécurité de nos services bancaires, notamment via le déploiement de notre dispositif d’authentification renforcée. »

La Banque postale s’est dotée d’une gouvernance spécifique pour maîtriser ce type de risques. Elle mène également à titre préventif des campagnes d’information régulières pour sensibiliser ses collaborateurs et clients aux tentatives de fraudes. « Il ne faut jamais communiquer ses codes et identifiants bancaires à une tierce personne. »

Enfin, pour ses clients victimes d’une fraude bancaire, La Banque postale « examine chaque situation individuelle avec la plus grande attention. Pour mémoire, selon le rapport de l’Observatoire de la sécurité des moyens de paiement 2021 publié par la Banque de France, les banques françaises remboursent la fraude : plus de 85 % des demandes adressées par les clients en cas d’opérations de paiement par carte contestées sont ainsi remboursées. »

« Les remboursements ne sont pas automatiques »

La Caisse d’épargne Loire-Centre explique appliquer la réglementation en vigueur en matière de contestation d’opération de paiement non-autorisée. « Nous avons déployé un dispositif d’alerte à titre préventif via nos canaux digitaux. Nous renouvelons par ailleurs nos conseils de prudence. Par exemple, nous ne demanderons jamais à nos clients des renseignements personnels ou des données bancaires pour valider ou annuler des opérations. »

La Fédération bancaire française prévient : « Toutes les fraudes ne sont pas des fraudes bancaires. Ainsi, les remboursements ne sont pas automatiques car il convient de vérifier que la contestation n’a pas pour origine un litige commercial, que la fraude ne vient pas d’une négligence grave ou que la contestation n’est pas faite hors délais légaux par exemple.

Une très large part des tentatives de fraude échoue, et lorsqu’un client est victime d’une fraude bancaire, il est remboursé dans les 24 heures. En cas de fraude, le premier réflexe doit être de faire opposition, via votre banque en ligne, votre application, en appelant le numéro de téléphone inscrit sur votre carte bancaire ou directement votre banque. Il convient ensuite de prendre contact avec votre conseiller, qui déterminera les circonstances et orientera sur les formalités à suivre. »

 

Article et photo Nouvelle République Loir et Cher site internet  22 juillet 2022

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