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Néobanques vertes – Peut-on vraiment leur faire confiance ?

Le monde de la finance verte s’étoffe avec l’apparition, ces dernières années, de nouveaux organismes de paiement, comme Helios. Ces banques 100 % en ligne promettent transparence et prise en compte de l’environnement dans la gestion des fonds confiés par leurs clients. Promesses tenues ? Nous faisons le point.

Helios, OnlyOne, Green-Got… Ces noms vous disent-ils quelque chose ? Il s’agit de la toute première génération d’établissements de paiement dits « verts ». Ces derniers incitent les consommateurs à « reprendre le contrôle », selon le slogan de la start-up Helios. Apparues en France à partir de 2018, ces entreprises promettent d’investir à 100 % l’argent qui leur est confié dans la transition énergétique. Elles déclarent notamment s’interdire tout soutien aux activités liées aux énergies fossiles, à l’armement, aux pesticides, etc. À noter que les consommateurs n’ont plus, pour l’instant, que le choix entre Helios et Green-Got. OnlyOne est en effet aujourd’hui en liquidation judiciaire. Pas d’inquiétude néanmoins pour ses dépôts financiers, malgré la jeunesse et la fragilité des deux fintechs restantes. Les montants recueillis par Green-Got et Helios sont conservés par des banques nationales (Crédit agricole et Crédit mutuel), avec une garantie des dépôts à hauteur de 100 000 €.

Les promesses de ces prestataires de paiement partent du constat, établi notamment par les rapports annuels Banking on Climate Change (rapport réalisé par plusieurs organisations non gouvernementales engagées pour le climat, comme Reclaim Finance ou BankTrack) que, depuis 2015 (date du forum mondial pour le climat), plus de 2 700 milliards de dollars ont été investis dans des projets d’énergies fossiles. Et, selon Oxfam (groupement d’associations caritatives et solidaires), plus de 40 % des crédits aux entreprises émis par le biais des 4 plus grandes banques françaises (BNP Paribas, Crédit agricole, Société générale et BPCE) concernent des entreprises actives dans le secteur du pétrole et du gaz, le secteur le plus émetteur de CO2.

Ainsi, selon les néobanques vertes, pour passer à une économie respectueuse de l’environnement, il faudrait commencer par s’attaquer aux sources de financement des activités les plus polluantes. Tout simplement en retirant son argent des grandes banques commerciales, et en le plaçant chez elles. Helios comme Green-Got proposent pour cela un compte courant avec mise à disposition d’une carte bancaire Visa ou Mastercard classique, ainsi que des possibilités d’épargne « responsables ».

Des engagements concrets

Les deux fintechs Helios et Green-Got offrent aux particuliers la possibilité d’ouvrir un compte courant, mais aussi de placer leur épargne dans une assurance vie. Dans les deux cas, elles jouent la transparence en indiquant la destination des sommes placées, sous l’une ou l’autre de ces formes.

L’épargne

S’agissant de l’argent épargné au sein de leur assurance vie, les prestataires de paiement affichent des engagements précis : 100 % des fonds disponibles via l’assurance vie ont une dominante verte, et une grande majorité affichent un label solidaire et responsable officiel (ISR, Greenfin ou Finansol). On trouve par exemple le fonds Mandarine Global Transition de Mandarine Gestion, le fonds BNP Paribas Funds Aqua de la BNP ou encore le fonds Novaxia FA (fonds privé spécialisé dans l’immobilier durable). Tous interdisent déjà les investissements dans les énergies fossiles et l’armement. En outre, Helios comme Green-Got affirment faire eux-mêmes un tri supplémentaire au sein des fonds labélisés, afin de déterminer (avec l’aide d’experts de la finance verte comme Carbon4) les plus vertueux en termes de transition énergétique.

Les dépôts bancaires

Les deux sociétés proposent chacune des cartes bancaires.

S’agissant des fonds déposés en compte courant, là aussi, l’information concernant l’utilisation est transparente. Comme ni Green-Got ni Helios ne possèdent pour l’instant d’agrément bancaire (ce ne sont que des prestataires de paiement), ils ne peuvent conserver les dépôts de leurs clients. Les sommes sont donc reversées à des banques d’adossement, le Crédit mutuel pour Green Got et le Crédit agricole pour Helios. L’argent est déposé sur un compte de cantonnement ou d’attente. « Depuis le lancement de nos comptes de paiement, il y a 3 ans, 85 millions d’euros de liquidités sont actuellement déposés chez Green-Got et ont donc été retirés des banques traditionnelles exposées aux énergies fossiles », affirme notamment la start-up Green-Got.

Quels effets ?

Première question que l’on se pose rapidement : existe-t-il un intérêt concret à mettre de l’argent sur un compte cantonné auprès du Crédit mutuel ou du Crédit agricole ? Car cet argent n’est pas réinvesti, il dort, en quelque sorte. De façon générale, les sommes en comptes courants ne sont pas utilisées par les banques de dépôt. Elles possèdent malgré tout un impact sur la capacité de financement de ces établissements. Leur montant est en effet pris en compte pour calculer le ratio de solvabilité à court terme de la banque. Ce ratio entre actifs et passif détermine la limite jusqu’à laquelle elle peut prêter. Donc, en retirant son argent des banques commerciales, on leur retire théoriquement une part de leur capacité d’investissement. « Dans les banques traditionnelles, votre argent ne dort pas, il pollue », résume à sa façon Helios sur son site.​​

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Reste qu’aujourd’hui, cet impact concret est très limité. De façon générale, seul un faible pourcentage des dépôts est pris en compte pour établir le ratio de solvabilité. Or, comme les montants déposés sur les comptes verts sont jusqu’ici anecdotiques, leur rôle sur la capacité d’investissement des banques l’est encore plus. Une goutte d’eau aujourd’hui au milieu des centaines de milliards d’euros d’investissements annuels des établissements financiers… Certes, si le mouvement de transfert était massif, il deviendrait beaucoup plus déterminant. Lucie Pinson, présidente de l’ONG Reclaim Finance, résume parfaitement la problématique : « Changer de banque est un levier pour changer la banque. Mais c’est un levier insuffisant pour mettre hors d’état de nuire les grandes banques qui alimentent la crise climatique. »

L’argent placé sur les assurances vie d’Helios et Green-Got, lui, ne dort pas, puisqu’il permet d’acheter des parts dans des fonds investis dans des activités en principe non polluantes. Effectivement, les fonds sélectionnés font partie des grands placements financiers labélisés ISR ou Greenfin. Bémol : une bonne partie des fonds ISR et Greenfin sont proposés par des sociétés de gestion, elles-mêmes filiales de grandes banques commerciales. Ces sociétés intègrent dans leur portefeuille un pourcentage d’entreprises financées non durables afin de garantir la performance financière.

Les néobanques vertes offrent une alternative intéressante aux consommateurs soucieux de l’impact de leur argent. Reste à savoir si leur montée en puissance suffira à peser réellement sur l’impact des grandes banques traditionnelles sur les énergies fossiles et les industries lourdes.

Élisa Oudin

Élisa Oudin

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