Une ordonnance du gouvernement prévoit d’étendre l’indemnisation des maisons implantées sur des sols argileux et fissurées par la sécheresse au-delà des critères actuels de reconnaissance catastrophe naturelle. Explications.
Au printemps dernier, Que Choisir enquêtait sur les maisons fissurées par la sécheresse en terrain argileux, un sinistre identifié sous le sigle RGA, pour retrait-gonflement des argiles. Les sécheresses étant de plus en plus fréquentes et durables, l’argile s’assèche, se tasse, se rétracte. Puis se gorge d’eau et gonfle dès que les pluies arrivent. Après plusieurs épisodes de ce type, les maisons commencent à se fissurer, la situation s’aggravant de sécheresse en sécheresse.
10,4 millions d’habitations seraient situées dans une zone à risque moyen ou fort, d’après la carte de l’exposition établie par le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) en 2019. Mais dans son rapport de février 2022 intitulé « Sols argileux et catastrophes naturelles », la Cour des comptes indique que « sur les neuf dernières années, 50 % des demandes communales de reconnaissance “CatNat sécheresse” n’ont pas abouti ». Cette reconnaissance étant le préalable à une éventuelle prise en charge par l’assurance habitation, un sinistré sur deux n’a droit à rien et vit dans une maison qui se dégrade, au point d’en devenir parfois dangereuse à habiter.
CARACTÈRE LENT ET PROGRESSIF DU PHÉNOMÈNE DE SÉCHERESSE
L’ordonnance du gouvernement entend augmenter le nombre de communes éligibles à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Pour y avoir droit, est ajoutée dans la partie RGA du Code des assurances « la succession anormale d’événements de sécheresse d’ampleur significative », mais « dont l’intensité mesurée année par année ne remplit pas les critères actuels », précise le gouvernement. Il ajoute que les critères de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle utilisés pour caractériser l’intensité des épisodes de sécheresse seront assouplis par rapport aux critères actuellement en vigueur, « la réforme visant à mieux prendre en compte le caractère lent et progressif du phénomène de sécheresse et réhydratation des sols ».
Autre volet, l’encadrement de l’expertise d’assurance, assorti de contrôles et de sanctions pour les experts qui ne remplissent pas les exigences de qualité prévues par la loi. Et côté assurés, l’obligation d’affecter l’indemnité reçue à des travaux de réparation de leur habitation.
Dès l’an prochain, cette ordonnance devrait améliorer le sort des sinistrés sans prise en charge à ce jour, sous réserve des décrets d’application qui doivent suivre. La loi du 28 décembre 2021 qui a réformé le régime CatNat au détriment des assurés n’est en revanche en rien modifiée.
Rapport d’expertise : l’État maintient la création d’un contrôle
C’est la première fois qu’un texte prévoit la possibilité pour des fonctionnaires et agents publics de réaliser un contrôle sur place, et d’instaurer de possibles sanctions à l’égard des experts d’assurance. Ce dispositif s’inscrit à l’article L. 125-2-2 du Code des assurances. Il s’agit d’une véritable avancée pour le consommateur, réservée pour l’instant au domaine des conséquences des épisodes de sécheresse. La reconnaissance du sinistre et le montant de l’indemnisation dépendent en effet quasi essentiellement des conclusions de l’expertise. Et les assureurs le savent bien ! C’est donc pour éviter d’éventuelles pressions de ces derniers que l’ordonnance a instauré les nouvelles règles. Preuve que la disposition a touché un point sensible : les trois grands syndicats d’experts d’assurance ont déposé, le 2 février dernier, un mémoire devant le Conseil d’État pour que ce dernier recommande « au gouvernement de retirer purement et simplement du projet d’ordonnance les dispositions litigieuses contenues au sein du titre IV de l’article 1er de ce projet visant à modifier le Code des assurances ». Heureusement pour le consommateur, le texte publié n’a au final pas été expurgé !
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Élisabeth Chesnais